Les Chroniques de Leki
La Pierre de Lune.
La Pierre de Lune.
Chapitre I
Vagabonder.
Vagabonder.
Une chaleur impitoyable régnait sur cette étendue inhospitalière de sable brulant, dont l’intensité renforcée par les escarpements rocheux formant une cuvette naturelle, la rendait insoutenable pour n’importe quel étranger. Le vent, ni même ne serait-ce qu’une légère brise, n’avait soufflé sur la région depuis dix-sept jours, laissant le silence gardien des lieux.
Seul un rapace dont le plumage noirâtre faisait de lui une tache dans le ciel brisait la plénitude de l’instant en survolant le vallon, planant grâce à ses larges ailes, secouant son crâne couvert d’une peau grise et abimée, il observait la zone à la recherche d’une source de nourriture.
Un léger sifflement finit par briser la tranquillité de désert, le charognard n’eut pas le temps de réagir et une pointe d’acier pénétra ses chairs, interrompant son vol plané pour entamer une chute d’une trentaine de mètres inévitablement soldée par un lourd impact au creux des dunes.
Une ombre se détacha lentement de celle de la falaise, une silhouette humaine avançait lentement vers sa proie. Encapuchonné et vêtu d’un grand manteau de toile qui protégeait sa peau du soleil cuisant, le chasseur replaçait son arc en bandoulière, palpant au passage et d’un geste machinal son carquois sanglé par de solides bandes de cuir à sa ceinture au bas de son dos. Il contempla le nécrosyrtes quelques secondes avant de s’agenouiller et retirer la flèche du poitrail animal d’un geste sec et vif, puis jugeant la flèche encore en bon état, il la rangea dans son carquois et saisit l’animal par les pattes.
Alors qu’il se redressait, le trappeur sentit le vent se lever brusquement amenant avec lui une senteur fétide et nauséabonde. Aussi, sa proie en main, il retourna se réfugier dans l’ombre de la falaise, tandis que le souffle venteux balayait l’erg, découvrant des ossements humanoïdes ci et là.
L’encapuchonné observait la scène, immobile, jetant un coup d’œil en direction de l’unique entrée du vallon. Pour lui cela ne faisait aucun doute, le vent était porteur d’un mauvais présage.
- Musique d'ambiance:
Le Soleil commençait à disparaitre de l’horizon lorsque le chasseur, qui avait passé les deux dernières heures à dépecer l’animal et à en découper les meilleurs morceaux, commençait à rassembler ses effets personnels en vue du départ. Le vent avait laissé place à un léger zéphyr trompeur, car l’atmosphère était pesante et malsaine, prenant jusqu’aux tripes et brisant même la volonté.
Le dernier rayon solaire disparu par de là les falaises, laissant à la Lune le soin d’éclaircir la noirceur de la nuit.
Au même instant, les ossements répandus sur le sol craquelèrent, arrachés à leur profond sommeil par une puissante magie nécrotique, les morts s’extirpaient lentement des sables les uns après les autres sous le regard horrifié du seul vivant de ce vallon maudit. Malgré leur nombre grandissant, l’inconnu devait se résoudre à triompher pour sa survie.
Mourir au combat sied au soldat et il n’en n’était pas un, le salut de sa victoire résulterait de sa fuite, levant les yeux vers la lune et l’implorant intérieurement, il se retourna et observa les ombres qui parsemaient la falaise. Il n’avait sur lui que son arc, son carquois de flèches et sa gourde d’eau, et c’est abandonnant tout le reste qu’il commença à escalader la paroi rugueuse jusqu’à la saillie située à environ une demi-douzaine de mètres au-dessus de sa tête. Il assurait chaque prise et prenait grand soin de ne faire tomber aucune roche pour ne pas alerter les morts fraichement relevés de sa présence, il savait qu’une seule flèche suffirait à causer sa perte.
Arrivé à hauteur de la corniche, il poussa sur ses bras en se basculant doucement vers l’avant afin de poser une jambe sur le rebord et se hisser sur l’arête rocheuse. De là, il observa de nouveau l’effroyable spectacle, terrifié par ces créatures d’outre-tombe qui erraient apparemment sans but dans le vallon. Les images atroces de ce qu’aurait pu être la suite des évènements traversaient son esprit, sapant tout son courage, laissant la peur prendre le dessus, il s’adossa contre la roche, essoufflé et à bout de force. L’envie de continuer son ascension avait disparue pour laisser place au désespoir.
« Pourquoi avoir pris la fuite ? Que signifiait cette fuite ? » Ce n’était, après tout, qu’un réflexe inconscient pour échapper à la douleur d’une mort certaine. « Combien de temps aurais-je souffert ? Une dizaine de secondes ? Peut-être même moins, ce qui n’est rien comparé à la souffrance que j’endure chaque jour. »
Il avait les mains au bord du précipice, penché vers l’avant, il se sentait attiré par le vide. L’idée d’une mort rapide le réconfortait terriblement, tandis que la vie lui faisait affreusement peur. Il leva la tête au ciel, laissant les larmes rouler sur ses joues, et son regard s’accrocha pour ne plus dévier à la Lune.
« La Lune montre le chemin. »
Quelques instant plus tard, il secoua la tête et se remit sur pied, il devait quitter cet endroit, la corruption s’immisçait insidieusement dans son esprit ! Rassemblant le peu de volonté qui lui restait et usant de la peur qu’il ressentait, le fugitif repris son escalade. Plus vite il serait loin de cet endroit, mieux cela vaudrait.
Le dos courbé et les mains appuyées sur ses genoux légèrement fléchis, l’encapuchonné reprenait son souffle et commençait à réaliser ce qu’il venait de vivre.
Il se redressa lentement, retirant sa capuche d’un geste mesuré, dévoilant une longue chevelure noir de geai encadrant un visage féminin à la peau mate. L’inconnue avait un visage fin et harmonieux, ainsi qu’un tatouage elfique gracieux sous les yeux, remontant jusqu’au front par l’arête nasale. Cependant la particularité de son visage ne résidait pas dans cette marque pourtant singulière, mais dans la couleur de ses yeux, l’iris gauche était d’un vert époustouflant rappelant les chaudes et vertes forêts d’Auridia, et le droit d’un bleu enivrant qui semblait provenir directement d’un des nombreux flots des mers glaciales du nord de Tamriel.
- Leki:
_Leki remercie la Lune de l’avoir guidée. Susurra-t-elle en observant ledit astre.
Sans s’attarder plus longuement dans cette région du désert, Leki reprit la route dans la noirceur de la nuit, conservant la direction du Nord-Est grâce aux astres qui parsèment la voute céleste, avançant à bon rythme dans l’étendue de dunes du désert d’Alik’r.